Tandis que certain(e) s rêvent de perdre facilement quelques kilos sans régime ou privation quelconque, d’autres luttent au quotidien pour prendre du poids. En effet, il arrive que nous perdions du poids sans raison apparente : cela peut être le résultat d’une simple fluctuation ou d’un changement de mode de vie, mais cela peut aussi être le signe d’un problème de santé sous-jacent (surtout si la perte de poids est importante et / ou persistante).
Est-ce normal de perdre du poids sans raison ?
Toute perte de poids rapide et importante doit alerter, surtout si elle survient en l’absence de modifications d’hygiène de vie. Pour cause ? La perte de poids rapide est normalement le résultat d’un déséquilibre entre l’apport calorique (alimentation) et les dépenses caloriques (activité physique et métabolisme de base). Si vous perdez du poids sans en avoir l’intention et sans avoir effectué de changements significatifs de mode de vie, cela peut signaler un problème de santé.
« La perte de poids involontaire se développe généralement en quelques semaines ou quelques mois. Elle peut être le signe d’un trouble physique ou mental important et est associée à un risque accru de mort », confirme le Dr Michael R. Wasserman dans son article publié par la Manuel MSD (source 1). Et de préciser : « Sa cause peut être évidente (une diarrhée chronique due à un syndrome de malabsorption, par exemple) ou occulte (un cancer non diagnostiqué, par exemple, qui tend à diminuer l’appétit et augmente parallèlement la dépense calorique). »
Quand s’inquiéter d’une perte de poids ?
Notre poids évolue tout au long de la journée et n’est jamais fixe. Il peut également varier selon les saisons et les événements de vie. C’est la raison pour laquelle les médecins ne s’inquiètent pas forcément toujours d’une augmentation ou d’une baisse des kilos sur la balance.
En général, le corps médical considère qu’un amaigrissement est cliniquement significatif lorsqu’une personne perd plus de 5 % de son poids en moins de six mois ou plus de 10 % de son poids en moins d’un an. « Cependant, cette définition traditionnelle ne fait pas de distinction entre la perte des masses corporelles maigres et grasses », souligne le Dr Michael R. Wasserman. L’expert relève aussi qu’une accumulation d’œdèmes ou de tumeur peut compenser et masquer un amaigrissement inquiétant.
Fatigue, douleurs, perte d’appétit… Les symptômes associés qui doivent alerter
Les personnes en proie à une perte de poids inexpliquée souffrent présentent souvent ces quelques symptômes associés :
- une perte d’appétit ;
- unefatigue intense ;
- des douleurs osseuses ;
- des douleurs abdominales ;
- une fièvre et des sueurs nocturnes ;
- une modification de la texture ou de la couleur des selles ;
- une soif excessive et une envie fréquente d’aller aux toilettes ;
- un essoufflement, voire une toux parfois accompagnée d’expectoration sanglante ;
- etc.
Chez les personnes âgées, la perte de poids inexpliquée peut aussi s’accompagner de céphalées, de douleurs à la mâchoire lors de la mastication et / ou troubles de la vision.
Causes : quelles maladies sont susceptibles de provoquer un amaigrissement ?
Comme indiqué ci-dessus, la perte de poids est généralement liée au fait que les personnes ingurgitent moins de calories que nécessaire. Mais de nombreux troubles physiques, émotionnels et mentaux peuvent aussi être à l’origine d’un amaigrissement involontaire. Tour d’horizon (non-exhaustif).
Un choc émotionnel ou un stress important
Rupture, perte d’un être cher, licenciement… Après un choc émotionnel important, certaines personnes perdent totalement l’appétit, ce qui peut induire une perte de poids anormale à court terme.
Par ailleurs, le stress excessif, qui a plutôt tendance à favoriser la prise de poids par le biais de mécanismes hormonaux peut aussi couper l’appétit (sensation d’estomac noué) et être à l’origine d’une perte de poids.
Une dépression
La perte d’appétit et la perte de poids sont des symptômes caractéristiques de la dépression. Si certaines personnes se réfugient dans la nourriture, d’autres perdent le goût de manger et cessent totalement de s’alimenter, tant les repas leur paraissent insurmontables.
Une anorexie non diagnostiquée
L’anorexie mentale est un trouble du comportement alimentaire (TCA) bien connu désormais, qui se traduit par un refus de maintenir un poids corporel normal (IMC souvent inférieur à 18,4 kg/m²) et une perte de poids intentionnelle. Elle touche principalement les jeunes femmes en proie à une perception erronée de leur corps (dysmorphophobie). En réalité la perte de poids est donc volontaire, mais certain(e) s patient(e) s ne la remarquent pas.
En vidéo : Le témoignage de Capucine : « Il y a 4 ans, je suis tombée dans l’anorexie »

Les troubles bipolaires ou schizophrènes
Les patient(e)s qui souffrent d’un trouble bipolaire peuvent parfois perdre la sensation de faim – ou en tout cas la négliger – en phase maniaque ou hypomaniaque. De fait, ils perdent du poids sans en comprendre la raison.
Lorsqu’ils / elles ne sont pas diagnostiqué(e)s ou stabilisé(e)s, les patient(e)s qui souffrent de schizophrénie peuvent aussi perdre le contact avec la réalité et oublier de s’alimenter, voire refuser complètement au prétexte que leur nourriture serait empoisonnée, par exemple.
Un dysfonctionnement hormonal (diabète mal ou hyperthyroïdie)
Un dérèglement de la glande thyroïde peut aussi avoir des répercussions importantes sur le poids. Lorsqu’elle fonctionne au ralenti (hypothyroïdie), elle favorise la perte de poids. Mais lorsqu’elle s’emballe (hyperthyroïdie), le métabolisme s’accélère : le transit s’accélère, le cœur s’affole notre production de sueur augmente… Ce qui peut entraîner une perte de poids sans raison apparente.
Un diabète non diagnostiqué ou mal contrôlé peut aussi de manifester par une perte de poids et une déshydratation sévère. L’incapacité du corps à utiliser efficacement le glucose le pousse à puiser dans ses réserves de graisse et de muscle.
Un trouble gastro-intestinal
Des affections telles qu’une maladie cœliaque, une maladie de Crohn, une colite ulcéreuse, une rectocolite hémorragique ou encore la pancréatite chronique peuvent provoquer une perte de poids due à une malabsorption des nutriments, à un trouble de l’appétit ou à l’inflammation chronique.
Une maladie infectieuse (SIDA, tuberculose, etc.)
La perte de poids inexpliquée peut aussi témoigner d’une infection virale ou bactérienne telles que la tuberculose, le sida, l’hépatite, la pneumonie, etc. En cause ? Une diminution de l’appétit, une augmentation des besoins énergétiques et / ou une altération de la fonction métabolique. La présence d’un parasite intestinal, comme le ténia, par exemple, peut aussi faire drastiquement chuter le poids corporel.
Une maladie auto-immune
Plusieurs maladies auto-immunes, comme la polyarthrite rhumatoïde, le lupus ou la sclérose en plaques peuvent, elles, provoquer une perte de poids en raison de l’inflammation systémique, de la douleur et de la fatigue qui altèrent l’appétit et le métabolisme.
La prise de médicaments
Certains médicaments, comme les antidiabétiques, les amphétamines et certains antidépresseurs peuvent entraîner une perte de poids involontaire qui passe souvent inaperçue.
La consommation de drogues
Moins connue, la consommation de drogues en grandes quantités, comme le cannabis, la cocaïne ou certains opiacés entraîne aussi une perte d’appétit à l’origine d’une perte de poids notable.
Par ailleurs, une consommation importante d’alcool peut diminuer les besoins énergétiques et donc s’accompagner d’une perte de poids !
Un cancer plus ou moins avancé
Dans certains cas, la perte de poids inexpliquée peut enfin être le symptôme précoce de certains cancers, comme le cancer du poumon, le cancer du pancréas, le cancer de l’estomac ou le lymphome. De fait, le cancer induit une diminution de l’appétit, une altération du métabolisme et une perte de tissu corporel.
L’âge et le pouvoir d’achat
Enfin, la perte de poids involontaire peut aussi être liée à l’âge : les personnes âgées, surtout lorsqu’elles sont isolées, peuvent perdre l’appétit ou refuser de s’alimenter et se laisser dépérir (syndrome de glissement). Par ailleurs, les problèmes sociaux-économiques peuvent aussi avoir un impact sur la régularité et la qualité des prises alimentaires – donc induire une perte de poids involontaire.
Quels examens et quelles prises de sang en cas de perte de poids inexpliquée ?
Vous l’aurez compris, mieux vaut ne pas prendre la situation à la légère ! En cas de perte de poids conséquente et non volontaire, prenez rapidement rendez-vous avec votre médecin traitant. En premier lieu, il / elle se concentrera sur l’anamnèse pour mieux comprendre l’évolution de votre poids et son impact sur votre santé physique et / ou psychique. Il / elle vous interrogera sur :
- vos antécédents de prise et de perte de poids ;
- votre appétit ;
- vos prises alimentaires ;
- votre déglutition ;
- votre digestion ;
- les médicaments éventuels que vous prenez (sur prescription ou non) ;
- votre consommation éventuelle d’alcool ou de drogues récréatives ;
- votre état d’esprit actuel et vos changements éventuels de situation personnelle (perte d’emploi, rupture, perte d’une personne chère, etc.)
- etc.
Vous pourrez aussi être amené(e) à tenir un journal alimentaire pour noter ce que vous mangez chaque jour et relever les éventuels symptômes d’alerte, comme une fatigue importante, des sueurs nocturnes, une sensation de malaise, etc.
Vient ensuite le temps de l’examen physique : le / la médecin vérifie vos signes vitaux pour détecter une fièvre, une fréquence cardiaque élevée, une respiration rapide et / ou une tension artérielle basse. Il / elle prend vos mesures de taille, de poids, de tour de taille et calcule éventuellement votre indice de masse corporelle (IMC). En fonction de vos symptômes, de vos antécédents médicaux et de ses suspicions cliniques, il / elle peut vous prescrire différents examens complémentaires et analyses sanguines pour évaluer votre état de santé :
- Un bilan sanguin complet, qui peut aider à évaluer votre état général de santé, notamment en vérifiant les niveaux de globules rouges, de globules blancs, d’hémoglobine, de plaquettes, ainsi que les marqueurs inflammatoires.
- Un bilan hormonalpour évaluer vos fonctions hépatiques, rénales et thyroïdiennes.
- Un dosage de l’amylase et de la lipase, pour évaluer la fonction pancréatique.
- Des tests de malabsorption du glucose et des graisses dans les selles
- Des analyses d’urine.
- Une glycémie.
- Des tests spécifiques à la recherche d’infections comme le VIH, la tuberculose ou les hépatites virales.
- Une endoscopie gastro-intestinale haute ou une coloscopie.
- Des examens d’imagerie divers, comme une radiographie, une échographie, une tomodensitométrie (TDM) du thorax ou de l’abdomen, une imagerie par résonance magnétique (IRM) ou encore une tomographie par émission de positrons (TEP).
- Enfin, des marqueurs tumoraux spécifiques peuvent être mesurés pour détecter la présence éventuelle de certains types de cancers.
Si tous les résultats des tests sont normaux, les médecins réévaluent généralement les personnes quelques mois plus tard pour voir si de nouveaux symptômes ou de nouveaux résultats sont mis en évidence, indique le Dr Michael R. Wasserman.
Quelle prise en charge en cas de perte de poids inexpliquée ?
La prise en charge dépend évidemment de la cause de la perte de poids. Elle consiste en priorité à traiter le trouble sous-jacent à l’origine de la perte de poids involontaire. Pour cela, votre médecin peut vous rediriger vers un médecin spécialiste, comme un nutritionniste, un gastro-entérologue, un endocrinologue ou encore un oncologue.
Un suivi médical et nutritionnel est généralement mis en place pour suivre l’évolution des patient(e)s et les aider à mieux équilibrer leurs repas ou à adapter leur régime alimentaire en fonction de leur situation. Cela peut inclure un changement au niveau de la nature ou de la quantité des aliments, la mise en place de collations entre les repas et avant le coucher, l’introduction d’aliments spécifiques, etc.
Si ces conseils alimentaires sont insuffisants ou trop difficiles à appliquer, des compléments alimentaires hautement nutritifs peuvent être utilisés. Et en dernier recours, dans certaines situations critiques (comme la cachexie ou l’anorexie sévère), les patient(e)s peuvent bénéficier d’une technique d’alimentation artificielle comme l’alimentation entérale (qui consiste à fournir directement les nutriments nécessaires à l’organisme dans votre tube digestif) ou l’alimentation parentérale (qui consiste à injecter les nutriments nécessaires à l’organisme par le biais du système sanguin).