Qu’est-ce que l’endométriose ?
En l’absence de grossesse, l’endomètre (la muqueuse qui tapisse l’utérus) se désagrège tous les mois et est évacué dans le sang des règles. Chez les femmes qui souffrent d’endométriose, des fragments de cette muqueuse migrent en dehors de la cavité utérine et vont se fixer sur certains organes : l’utérus, les ovaires, la vessie… « Tous les mois, au moment des règles, ces fragments de muqueuse ayant migré dans le ventre saignent, provoquant une irritation du péritoine, des kystes ou des nodules », explique le Pr Philippe Descamps, gynécologue-obstétricien et responsable du centre de référence de l’endométriose au CHU d’Angers, EndorefAngers. Conséquences : les femmes ressentent des douleurs parfois intenses au moment des règles et certaines ont des problèmes d’infertilité.
Quels sont les stades de l’endométriose ?
L’endométriose est classée en trois types, selon la localisation et l’étendue des lésions.
– L’endométriose superficielle ou péritonéale
Les fragments de muqueuse utérine se greffent sur le péritoine, cette enveloppe qui entoure la vessie, l’utérus et le rectum. « Ces lésions ne sont pas toujours visibles à l’échographie ou à l’IRM, mais elle peuvent entraîner des douleurs et des adhérences », précise le Pr Descamps.
– L’endométriome ou endométriose ovarienne
Du sang de règles s’accumule au niveau d’un ovaire, formant une sorte de poche. Ce kyste est visible à l’échographie ou à l’IRM.
– L’endométriose profonde
Ce type d’endométriose touche certains organes comme le rectum, l’intestin, la vessie ou les ligaments utéro-sacrés qui sont insérés en arrière de l’utérus.
Endométriose profonde : quels symptômes ?
Les douleurs de règles (dysménorrhées) sont caractéristiques de l’endométriose quelle que soit la forme de la maladie. L’intensité de ces douleurs varie d’une patiente à l’autre. « Il n’y a pas de parallélisme entre l’anatomie et la clinique, explique le Pr Descamps. Certaines femmes ont de petites lésions très douloureuses. D’autres ont des lésions importantes mais sans que la douleur soit très forte. »
– Les rapports sexuels peuvent devenir douloureux en cas d’endométriose, surtout lorsque les lésions sont localisées entre l’utérus et le rectum. On parle de dyspareunie.
– Dans l’endométriose profonde, des organes digestifs (côlon ou rectum) peuvent être touchés avec des symptômes comme :
– des douleurs à la défécation qui s’expliquent par la présence de lésions au niveau du rectum.
– Une alternance de diarrhées et de constipation dans la période prémenstruelle.
Endométriose profonde et FIV
Certaines femmes souffrant d’endométriose peuvent avoir des difficultés à tomber enceinte et doivent recourir à une fécondation in vitro (FIV). En réalité, les chances de grossesse varient grandement d’une patiente à l’autre. Une femme souffrant d’endométriose profonde peut devenir enceinte naturellement ou être obligée de recourir à l’assistance médicale à la procréation, tout dépend des lésions dont elle souffre.
La chirurgie de l’endométriose profonde améliore-t-elle la fertilité ?
« Nous n’en avons pas la preuve. Un essai est en cours dans différents centres français pour tenter d’avoir la réponse », répond le Pr Descamps. En attendant, une seule certitude : l’ablation d’un nodule situé dans le vagin va soulager les douleurs et faciliter les rapports sexuels. Donc, d’une certaine manière, améliorer la fertilité.
Comment savoir si on a une endométriose profonde ?
Dans l’endométriose, deux examens d’imagerie sont essentiels : l’échographie et l’imagerie par résonance magnétique (IRM).
Dans tous les cas, on commence par une échographie pour visualiser les lésions. Pour une meilleure efficacité, l’examen doit être réalisé de préférence dans un centre de référence, où les échographistes sont de véritables spécialistes de l’endométriose.
Pour diagnostiquer l’endométriose profonde, on a davantage recours à l’IRM. « Elle permet de bien localiser les lésions et leur extension », précise le gynécologue.
L’examen vaginal est-il indispensable ?
Ces dernières années, des femmes souffrant d’endométriose ont dénoncé la pratique systématique, en consultation, de touchers vaginaux extrêmement douloureux. Certaines en ont été traumatisées. Aujourd’hui, le Pr Descamps estime que les pratiques évoluent : « Il y a eu une prise de conscience chez les gynécologues. Le plus souvent, il n’est pas nécessaire de pratiquer un toucher vaginal, voire un toucher rectal, si on dispose d’une échographie et d’une IRM de qualité. Ces examens suffisent, en général, à nous renseigner de manière très précise. De plus, ces examens pourront être réalisés au bloc opératoire si la patiente est opérée (elle sera donc endormie, NDLR) »
Comment soigner une endométriose profonde ?
Quel que soit le type d’endométriose, la prise en charge de la maladie est toujours personnalisée, adaptée à chaque femme avec, au centre des préoccupations, la préservation de la fertilité. Chaque patiente doit ainsi être accompagnée jusqu’à sa ménopause, période au cours de laquelle l’endométriose disparaît spontanément.
Le traitement comprend différents niveaux :
– La pilule en continu : premier traitement de l’endométriose
Concrètement, il s’agit de prendre une contraception tous les jours et sans interruption, afin de supprimer les variations hormonales. Les règles vont disparaître et, par conséquent, les douleurs qui les accompagnent. Le traitement va aussi stopper l’évolution de la maladie en empêchant les lésions de proliférer. « Il est important d’expliquer aux jeunes femmes que ce n’est pas grave de ne plus avoir de règles. Le corps n’a pas besoin du sang des règles pour se purifier chaque mois », rappelle le gynécologue. Un autre médicament à base de progestérone, le dienogest, peut également être prescrit. Il a, comme la pilule en continu, la particularité de supprimer les règles.
Pour permettre une grossesse, le traitement est interrompu le temps nécessaire. Mais il devra être repris ensuite, sous peine de voir l’endométriose revenir. « La grossesse est souvent vécue par les femmes souffrant d’endométriose comme une parenthèse enchantée. En raison du risque de récidive, il faudra reprendre un traitement après l’accouchement », observe le gynécologue.
– Traiter la douleur sans hormone
Certaines femmes refusent de prendre un traitement hormonal. Dans ce cas, la douleur est combattue par d’autres moyens (médicaments antalgiques, électrostimulation…). Mais s’ils peuvent soulager ponctuellement la patiente, ces traitements n’agissent pas sur le mécanisme de la maladie.
Endométriose profonde : quel traitement chirurgical ?
La chirurgie n’est envisagée que lorsque « la douleur résiste au traitement médical », explique le Pr Descamps. « Il s’agit d’une chirurgie complexe, qui doit être pratiquée dans un centre de référence par une double équipe incluant un gynécologue et un chirurgien digestif », précise-t-il. Les nodules et les kystes qui se sont greffés sur les organes sont ôtés, le plus souvent, par coelioscopie (les instruments chirurgicaux sont introduits par de petites incisions dans l’abdomen).
Dans certains cas d’endométriose profonde, la résection d’une partie du rectum ou de l’intestin est parfois nécessaire. L’anastomose (les deux parties sont recousues ensemble) est réalisée dans la foulée.
« En cas d’endométriose profonde chez une jeune femme, il est important de vérifier que la chirurgie ne porte pas atteinte à l’intégrité de l’appareil génital pour préserver les chances de grossesse », explique le spécialiste. Chez une femme de plus de 40 ans, il est parfois nécessaire d’enlever l’utérus (hystérectomie).
Chirurgie de l’endométriose profonde : quels risques de complications ?
Toute opération chirurgicale comporte des risques et chaque femme en est informée avant l’intervention. Les complications (lâchage des sutures, fistule, difficultés à uriner…) concernent 5 à 10 % des cas. Il est parfois nécessaire de réopérer la patiente. Pour limiter ces risques au maximum, le Pr Descamps rappelle l’importance d’être prise en charge dans un centre de référence de l’endométriose, où des praticiens entraînés à réaliser cette chirurgie exercent.
À savoir : des associations de patientes se sont créées autour de l’endométriose, comme EndoFrance et EndoMind.