Définition : Qu’est-ce que la bilirubine libre, conjuguée et totale ?
La bilirubine est un pigment jaune, issu de la dégradation de l’hème, à savoir une partie de l’hémoglobine.
Dr Mathieu Kuentz, médecin biologiste : Il s’agit d’un processus naturel de destruction via les macrophages, qui a lieu lorsque les globules rouges sont âgés. Les cellules sont phagocytées et l’hème est dégradé puis transformé en bilirubine.
Cette bilirubine est d’abord libre, et se fixe à des protéines plasmatiques – albumine – , transportée jusqu’au niveau du foie, ou elle est conjuguée pour devenir soluble, afin d’être éliminée dans les sels biliaires via la vésicule biliaire. La bilirubine conjuguée – aussi appelée bilirubine directe – transite ensuite dans le système digestif où elle est dégradée. Au cours de ce transit, une partie de la bilirubine est réabsorbée puis acheminée jusqu’au foie pour être de nouveau excrétée dans les sels biliaires. La très grande majorité de bilirubine est dégradée au niveau intestinal en stercobilinogène, pigment brun, et ensuite éliminée dans les selles (99%) conférant leur couleur brune. Seule une infime partie dans les urines (1%) » indique le Dr Kuentz
La bilirubine totale correspond à la somme de la bilirubine libre et de la bilirubine conjuguée.
Bilirubinémie : le dosage par prise de sang de la bilirubine
Le dosage de la bilirubine est proposé lorsque l’on suspecte une élévation de son taux dans le sang. « Le dosage de la bilirubine s’obtient grâce à un prélèvement sanguin, prise de sang, effectuée en laboratoire. Il est rarement réalisé de façon isolé, mais principalement associé à un bilan hépatique, avec le dosage des Gamma GT (GGT), des phosphatases alcalines (PAL) et des enzymes hépatiques (ASAT, ALAT) » rappelle le Dr Kuentz.
C’est dans un premier temps uniquement le taux de bilirubine totale qui est mesuré. S’il est trop élevé, on mesure dans un second temps la bilirubine libre. « Puis, la bilirubine conjuguée est calculée par la soustraction de la bilirubine totale et de la bilirubine libre » explique le spécialiste.
Savoir laquelle des bilirubines – libre ou conjuguée – est augmentée, permet d’orienter le diagnostic.
Normes : Quelles sont les valeurs normales ?
La concentration normale de bilirubine totale dans le sang dépend de l’âge de la personne. « La valeur peut varier en fonction de la technique de dosage, mais à l’âge adulte, elle est habituellement inférieure à 20 μmol/Litre de sang » indique le biologiste médical.
Excès : Est-ce grave d’avoir trop de bilirubine ?
Au-dessus de 35 μmol/l de bilirubine, on constate une coloration jaune des tissus (peau et blanc de l’oeil) liée à une trop forte concentration de bilirubine : c’est l’ictère.
Un excès de bilirubine libre peut entraîner une toxicité cérébrale. « Mais ces doses toxiques sont très rarement atteintes chez l’adulte » rassure le Dr Kuentz. En revanche, l’excès de bilirubine peut être le signe d’une maladie potentiellement grave. Le danger ne vient alors pas de la bilirubine en elle-même, mais de la pathologie qui a entraîné son élévation.
En pédiatrie en revanche, l’atteinte d’un seuil de bilirubine libre toxique peut arriver plus facilement, compte tenu du faible volume sanguin d’un nourrisson et d’une immaturité hépatique diminuant sa conjugaison et donc son élimination.
Quelles maladies augmentent la bilirubine ?
Dr Kuentz : Il y a deux grands types d’étiologies induisant une bilirubine trop élevée, dite aussi hyperbilirubinémie : soit une affection du système hépatique ou biliaire qui empêche l’élimination de la bilirubine, soit une anomalie hémolytique entraînant une destruction trop importante des globules rouges.
– Les affections hépato-biliaires : La cause la plus fréquente est la cholestase extra ou intra-hépatique. « La cholestase empêche l’évacuation de la bilirubine dans le tube digestif, qui est donc refoulée dans le sang » décrit le biologiste médical. Cela se traduit par une augmentation de la bilirubine conjuguée, et les signes cliniques sont une décoloration des matières fécales et des urines foncées.
– Les origines hémolytiques : Elles sont dûes à une sur-destruction des globules rouges, qui dépassent la capacité de conjugaison du foie. « C’est donc cette fois une accumulation de bilirubine libre dans le sang » ajoute le Dr Kuentz. Ces anomalies hémolytiques se traduisent par une anémie associé à un ictère, liée à la destruction trop importante des globules rouges.
Les nouveau-nés peuvent également présenter un excès de bilirubine qui se manifeste par un ictère du nourrisson. Deux causes principales à ce phénomène :
– Une anomalie hémolytique du nouveau-né, qui peut être lié à une incompatibilité foeto maternelle de groupe sanguin (ABO ou Rhésus),
– Une prématurité, induisant une immaturité du système hépatique, qui n’est pas assez efficace pour conjuguer la bilirubine libre.
Maladie de Gilbert
La maladie de Gilbert, ou syndrome de Gilbert, est une pathologie bénigne et assez fréquente – qui toucherait entre 3 et 10% de la population. Elle est causée par une déficience héréditaire d’une enzyme impliquée dans le métabolisme de la bilirubine.
Les personnes atteintes par ce syndrome ont une bilirubine légèrement élevée et fluctuante, avec un ictère inconstant et une conjonctive un peu jaune. « Cette pathologie n’entraîne pas d’anémie, ni d’autres symptômes. Le bilan hépatique est normal » ajoute le spécialiste.
Comment faire baisser son taux de bilirubine ?
Lorsque le taux de bilirubine est trop élevé, il faut en comprendre la cause et la traiter, pour que le taux redevienne normal.
« En cas d’anémie hémolytique, on traite l’hémolyse. S’il s’agit d’une cholestase biliaire, on en trouve la cause (lithiase, fibroses, tumeur, hépatite virale, insuffisance hépatique, parasite ….) et on la traite » énumère le biologiste médical.
L’ictère du nourrisson est quant à lui traité à l’aide de lampes de photothérapie, qui émettent des rayons Ultra-Violets (UV), qui modifient la bilirubine afin qu’elle puisse être plus facilement excrétée.