Comme son nom le laisse deviner, la colectomie est une intervention chirurgicale qui consiste à retirer une partie du côlon, voire de sa totalité. Selon les cas, on distingue la colectomie droite, la colectomie transverse, la colectomie gauche et la sigmoïdectomie (l’ablation du côlon sigmoïde). Comment se déroule ce type d’intervention ? Dans quels cas est-il recommandé ? Quelles précautions prendre ? Réponses du Dr Aurélien Dupré, chirurgien spécialiste en cancérologie digestive au centre de lutte contre le cancer Léon Bérard (Lyon).
Définition : qu’est-ce qu’une colectomie ?
La colectomie est LE traitement de référence du cancer du côlon, indique d’emblée le Dr Dupré. Elle consiste le plus souvent à enlever un morceau de côlon avant de rétablir le circuit intestinal par anastomose. « En pratique, dans le cadre d’un cancer du côlon par exemple, on retire les cellules cancéreuses avec une marge de sécurité, puis on raccorde les deux parties du côlon« , explique-t-il.
Pour rappel, le rôle du côlon est d’absorber l’eau de nos selles pour les rendre plus compactes. Avec le rectum, il constitue le gros intestin, soit la dernière partie de notre tube digestif. Contrairement au petit intestin (l’intestin grêle), il ne joue aucun rôle dans l’absorption des aliments
Colectomie totale, élargie ou partielle ?
Le plus souvent, la colectomie nécessite de retirer un seul segment du côlon : on parle donc de colectomie partielle.
La colectomie « élargie » peut parfois être nécessaire : elle consiste à retirer plusieurs segments du côlon, par exemple le segment droit et transverse, ou le segment gauche et transverse.
Dans des cas bien plus rares, la situation nécessite l’ablation de l’intégralité du côlon : on parle de colectomie totale.
Colectomie droite, gauche, transverse ou sigmoïdectomie ?
Le côlon est constitué de plusieurs segments. Selon le segment atteint, on distingue donc différents types d’opérations :
- la colectomie droite, qui consiste à retirer la partie droite du côlon (aussi dite ascendante) ;
- la colectomie transverse, qui consiste à retirer la partie transverse du côlon (qui relie le côlon droit au côlon gauche) ;
- la colectomie gauche, qui consiste à retirer la partie gauche du côlon (aussi dite descendante) ;
- la sigmoïdectomie, qui consiste à retirer le côlon sigmoïde (qui relie le côlon gauche au rectum).

© Institut national de Cancer (source 1)
Indications : quand et pourquoi faire une colostomie ?
Cette chirurgie digestive peut être indiquée dans le cadre de plusieurs pathologies :
- un cancer du côlon ;
- la présence d’un polype trop volumineux ou susceptible de dégénérer en cancer ;
- une sigmoïdite diverticulaire (une inflammation d’un ou plusieurs diverticules situés du côlon sigmoïde) ;
- une maladie inflammatoire chronique de l’intestin (MICI), comme la maladie de Crohn et la rectocolite hémorragique.
Quelles précautions prendre avant l’ablation d’un segment du gros intestin ?
Contrairement à ce que l’on pourrait penser, la colectomie ne nécessite pas de préparation spécifique du côlon, assure le Dr Dupré. Oubliez les régimes spécifiques ou les purges inconfortables ! Toutefois, si cela vous permet de vous sentir plus à l’aise, privilégiez une alimentation pauvre en fibres, prenez vos précautions sur la selle et utilisez une poire de lavement avant votre admission.
Vous serez hospitalité(e) quelques heures avant l’intervention. Quelques précautions sont toutefois nécessaires pour favoriser son bon déroulement et son succès :
- arrêtez de manger au moins 6 heures avant l’intervention ;
- privilégiez des boissons sucrées (thé glacé, jus de fruits, etc.) et arrêtez de boire au moins 3 heures avant l’intervention ;
- arrêtez de fumer (ou du moins limitez fortement votre consommation) quelque temps avant l’opération pour favoriser la cicatrisation ;
- quant à l’alcool, évitez de boire dans les sept jours qui précèdent l’opération. Le jour J, bannissez-le totalement.
Comment se passe une colectomie ? Combien de temps dure-t-elle ?
La colectomie dure généralement entre 1 h 30 et 3 heures au bloc opératoire, sous anesthésie générale. « Elle est réalisée par cœlioscopie : on accède à l’intérieur de l’abdomen grâce à de petites incisions au niveau de la paroi abdominale, dans lesquelles on introduit une microcaméra et de micro-instruments », précise le Dr Dupré. En cas de complication, l’équipe médicale peut toutefois changer d’avis pendant l’intervention et pratiquer une laparotomie plus ou moins large.
Quoi qu’il en soit, le principe reste le même. L’équipe médicale commence par poser une sonde urinaire et une sonde gastrique en début d’intervention. Vient ensuite la phase d’observation. Dans le cas d’un cancer du côlon, le chirurgien examine le gros intestin pour constater l’étendue de la tumeur. Il s’assure aussi que les métastases n’ont pas atteint d’autres organes, comme le foie, l’estomac ou le pancréas.
Il est ensuite temps de retirer le segment atteint en prenant soin de marquer des marges de sécurité pour limiter le risque de récidives locales.
Concrètement, on extrait la tumeur en entier et on prélève aussi une portion saine de tissu de part et d’autre (environ 5 centimètres), explique le Dr Dupré.
En cas de polype ou de cancer du côlon, le chirurgien réalise également un curage ganglionnaire : il enlève les vaisseaux et les ganglions proches de la tumeur pour savoir s’ils contiennent — ou non — des cellules cancéreuses.
Vient ensuite le moment de recoudre les extrémités des segments restants à l’aide de fils (anastomose manuelle) ou à l’aide de pinces mécaniques et d’agrafes (anastomose mécanique). Quelle que soit la technique utilisée, l’objectif est de restaurer le conduit intestinal pour assurer une bonne continuité digestive.
Bon à savoir : en cas de colectomie complète, l’équipe médicale posera une stomie digestive, autrement dit un anus artificiel, qui permet l’évacuation des selles vers une poche dédiée. Ce dispositif est indispensable à vie car on ne pratique ni la greffe ni la pose de prothèse de côlon. Une stomie transitoire peut aussi être posée en cas de colectomie partielle ou élargie.

© Centre hospitalier de Luxembourg (source 2)
Colectomie par cœlioscopie ou laparotomie : quelles suites opératoires ?
La durée d’hospitalisation post-opératoire dépend de plusieurs facteurs : le type d’intervention pratiqué, l’état de santé de chaque patient et sa réaction face à l’anesthésie. Avant de signer une autorisation de sortie, l’équipe médicale s’assure :
- de l’absence d’infection,
- de l’absence de douleurs post-opératoires,
- et de la bonne reprise du transit intestinal,
Les éventuels drains et sondes urinaires sont également retirés en fonction des recommandations du chirurgien. La prise de médicaments anticoagulants et le port de bas de contention sont aussi souvent préconisés.
« Si la colectomie fait suite à un cancer du côlon, on a souvent recours à des séances de chimiothérapie pour limiter les risques de récidive », souligne le Dr Dupré. Les séances se tiennent généralement toutes les deux semaines, pendent trois à six mois selon le stade du cancer avant l’intervention.
Bon à savoir : la cœlioscopie permet de limiter les douleurs et les complications post-opératoire. Selon les cas, elle permet aussi de diminuer le temps opératoire, donc la durée de l’anesthésie générale. Autre avantage, les cicatrices consécutives à une cœlioscopie sont beaucoup moins visibles que la cicatrice verticale tracée au milieu de l’abdomen en cas de laparotomie.
Quelles sont les complications potentielles de cette opération du côlon ?
Les complications liées à une colectomie restent exceptionnelles.
Pendant l’intervention, l’équipe peut faire face à des complications hémorragiques. À court terme, la colectomie peut occasionner une infection, voire un abcès au niveau de la cicatrice.
« Mais la plus inquiétante des complications est la fistule anastomotique (une fuite au niveau de la couture intestinale) », alerte le Dr Dupré. Et d’insister : « Si la couture s’infecte et fuit, elle peut déboucher sur une péritonite, une infection généralisée au niveau de l’abdomen, qui se manifeste le plus souvent par de la fièvre associée à des douleurs abdominales et à l’arrêt du transit digestif ». De quoi justifier une surveillance rapprochée dans les jours qui suivent l’opération. La prise en charge de cette complication dépend de sa gravité : on peut miser sur des antibiotiques et / ou une nouvelle intervention chirurgicale pour poser une stomie provisoire.
Comment sont les selles après une colectomie ?
Sur le court / moyen terme, les troubles du transit sont très fréquents : augmentation du nombre de selles, diarrhée, constipation, etc. Rien d’anormal, étant donné qu’on a retiré une partie de votre côlon : votre corps doit s’adapter !
Dans le détail, plus la portion du côlon enlevée est importante, plus les selles sont molles. Et en cas de colectomie totale, les diarrhées peuvent être très importantes pendant les premiers mois. « De nombreux patients rapportent aussi une augmentation significative de leurs gaz », indique le Dr Dupré. Seules solutions ? La patience, couplée à un régime alimentaire adapté.
Rassurez-vous, l’équipe médicale vous expliquera tous les détails de la procédure et les soins post-opératoires spécifiques à votre situation !
Comment se déroule la convalescence ? Quel suivi après l’intervention ?
La convalescence peut être découpée en deux parties : la période post-opératoire et le temps convalescence à la maison. La période post-opératoire peut durer trois à dix jours. Elle permet à l’équipe médicale de s’assurer que les patients retrouvent leurs capacités normales, ne souffre pas de douleurs anormales et ne présente pas de complications. Comme indiqué ci-dessus, les pansements et les cicatrices sont régulièrement surveillés par les infirmières qui retirent aussi progressivement les drains et autres sondes. L’équipe médicale accompagne ensuite la reprise de l’alimentation. Objectif : ne pas brusquer le système digestif.
Le temps de convalescence, lui, peut durer plusieurs mois. Il permet au patient de retrouver un transit moins « capricieux ». En cas de diarrhée, des ralentisseurs du transit peuvent être prescrits, parallèlement au suivi d’une alimentation pauvre en résidus. Certains patients constatent également une perte de poids, qui sera rapidement corrigée lorsqu’ils reprendront une alimentation « classique ».
Pour ce qui est du sport et des efforts physiques, les médecins recommandent généralement d’éviter tout effort physique pendant au moins deux mois, au risque de retarder la cicatrisation. Il est toutefois possible de reprendre ses activités du quotidien dès le retour à la maison. Concernant la reprise du travail et de la conduite automobile, demandez conseil à votre médecin.