La peur de prendre du poids à l’arrêt du tabac peut être un frein au sevrage. L’important est d’être bienveillant.e avec soi-même et de ne pas tout vouloir faire en même temps. Faire un régime est difficile, arrêter la cigarette est très difficile, mais commencer ces deux démarches en même temps, c’est le meilleur moyen qu’aucun de vos projets n’aboutisse ! Comment éviter les pièges du sevrage ?
Pourquoi prend-on du poids quand on arrête de fumer ?
La cigarette aurait bel et bien un effet biologique sur l’appétit des fumeur.euses, mais aussi sur l’apport alimentaire des personnes qui ont récemment arrêté.
- Le tabac coupe la faim : la nicotine stabilise le taux de sucre sanguin (glycémie), ce qui a pour effet de réguler l’appétit. De plus, une longue fréquentation du tabac entraîne une perte du goût et de l’odorat ;
- Il calme l’anxiété : en augmentant la sécrétion de sérotonine, l’hormone du bien-être, la nicotine constitue un anxiolytique des plus efficaces. Un fumeur apaise ainsi son stress plus avec une cigarette qu’avec du chocolat ;
- Il occupe les mains et la bouche : que l’on fume ou que l’on grignote, la gestuelle est semblable.
Fumer une cigarette fait brûler des calories
Le tabac augmente le métabolisme de base : à chaque cigarette, 10 calories s’envolent sans effort. Ainsi, la dépense énergétique, engendrée par chaque paquet, équivaut à celle de 20 minutes de natation ou de 30 minutes de marche active. Ce qui n’enlève en rien les effets néfastes de la cigarette sur notre santé…
Arrêt du tabac et prise poids : l’étude qui explique les liens
Une étude menée par des chercheurs de l’Université du Minnesota démontre un lien clair entre sevrage nicotinique et mauvaises habitudes alimentaires. Publiée dans le Journal of Drug and Alcohol Dependence (source 1), l’étude met en avant les effets du sevrage tabagique sur le système opioïde de l’organisme, qui gère la dépendance et la régulation de l’appétit.
L’équipe a suivi un groupe de participants constitué de fumeurs et de non-fumeurs âgés de 18 à 75 ans. Ils ont été répartis au hasard dans deux groupes, l’un effectuant un sevrage nicotinique de 24 heures avec 50 mg de naltrexone (un antagoniste des opiacés), l’autre un sevrage avec des produits placebo. À la fin de chaque session, les participants ont reçu un plateau de collations dont la densité énergétique et la composition variaient.
Verdict : les fumeurs en sevrage ont consommé des produits plus caloriques que les non-fumeurs, et les participants recevant de la naltrexone ont été moins susceptibles que les autres de choisir des aliments très gras. La naltrexone a normalisé l’apport calorique des fumeurs en sevrage, à des niveaux équivalents à ceux observés chez les non-fumeurs, ce qui suggère que le système opioïde endogène est responsable de cette appétence pour la malbouffe en période de sevrage nicotinique. Une découverte qui pourrait aboutir à de nouveaux traitements, afin d’aider au sevrage tabagique tout en limitant l’adoption de mauvais comportements alimentaires et la prise de poids qui en découle souvent. Des kilos en plus qui augmentent en outre le risque de rechute.
« La peur de prendre du poids est une préoccupation majeure chez les fumeurs qui envisagent d’arrêter de fumer. La clé pour éliminer ces obstacles est de mieux comprendre les facteursqui augmentent l’envie d’aliments riches en calories », a conclu Mustafa al’Absi, professeur au Département de médecine familiale et de santé biocomportementale de l’Université du Minnesota, qui a dirigé l’étude.
Prend-on forcément du poids ? Combien de poids prend-on en moyenne ?
La prise de poids systématique à l’arrêt du tabac est une idée reçue ! Un fumeur sur trois ne grossit pas après avoir arrêté de fumer ! Chez les autres, cette prise de poids est en moyenne de deux à quatre kilos. Certains ne prennent qu’un kilo, d’autres en prennent davantage. Un chiffre à nuancer, car les fumeurs ont en général un poids inférieur à celui qui leur correspond : à l’arrêt, il ne fait que s’ajuster, revenir à la normale. Tout dépend de l’organisme de chacun et de sa capacité à gérer le sevrage.
Il est possible de réguler son appétit grâce à quelques conseils
« Ce phénomène est normal car la nicotine des cigarettes possède une action hyperglycémiante », explique Caroline Bertossa, diététicienne et tabacologue. Elle entraîne donc des modifications de l’appétit : plus petite faim et satiété plus précoce. « Par ailleurs, stopper le tabac s’accompagne souvent de la redécouverte des saveurs et des odeurs, ce qui contribue à renforcer le coup de fourchette ».
Pour éviter d’avoir faim, il est indispensable de prévoir chaque jour trois 3 repas complets + 1 éventuelle collation.
Il faut augmenter la ration de légumes et en consommer, crus ou cuits, à chaque début de repas, recommande le Dr Corinne Chicheportiche-Ayache, médecin nutritionniste. Ils contribuent à avoir une satiété plus précoce et plus durable en ralentissant, grâce à leurs fibres, l’assimilation des autres aliments.
Doit-on faire un régime quand on arrête de fumer ?
« Pendant l’arrêt, faire un régime pour maigrir n’est pas souhaité. Pas besoin de stress en plus ! L’essentiel est de garder une alimentation variée », indique un document de Tabac Info Service (source 2). Exit les régimes draconiens quand on arrête de fumer !
Les solutions pour arrêter facilement les fringales alimentaires
Fumer crée une dépendance physique et comportementale. « À l’arrêt, on ressent un double manque », note Caroline Bertossa. « Bonbons, chocolat, biscuits salés et sucrés… constituent alors, pour certains, des substituts à la cigarette ».
Surtout pas de régime hyperrestrictif qui conduirait assurément à l’échec ! « Arrêter le tabac est suffisamment frustrant, insiste la diététicienne. Ce n’est pas la peine d’en rajouter ». Pour s’assurer une satiété durable tout au long de la journée, on veille à avoir à chaque repas un peu de féculents à index glycémique bas ou modéré (quinoa, céréales complètes, pain au levain, légumineuses…) et une source de protéines animale ou végétale (viande, poisson, œufs, tofu…).
« On peut aussi instaurer une collation dans l’après-midi », recommande Corinne Chicheportiche-Ayache. « Et boire régulièrement, de l’eau, des boissons chaudes non sucrées… pour stopper la pulsion, éliminer les toxines et remplacer la gestuelle ». Cela nécessite d’anticiper, en ayant sous la main des fruits, des laitages nature… ».
Arrêt de la cigarette : est-ce qu’un substitut nicotinique peut limiter la prise de poids ou faire maigrir ?
Les substituts nicotiniques peuvent en effet avoir un effet sur le fonctionnement du corps et permettre de prendre moins de poids, explique Tabac Info Service. « La nicotine supprime la sensation de manque et permet ainsi de limiter le grignotage pour compenser les envies de fumer ». Mais ils ne permettent en aucun cas de maigrir ! N’hésitez pas à en parler avec un.e professionnel.le de santé.
Pour limiter la prise de poids, on freine aussi le stockage des graisses
La nicotine modifie le métabolisme des lipides en freinant le stockage des graisses. Lors du sevrage tabagique, le métabolisme des graisses revient donc à la normale. « Fumer augmente aussi le métabolisme de base, c’est-à-dire les dépenses de l’organisme au repos, jusqu’à environ 200 calories par jour pour un paquet de cigarettes », ajoute le Dr Chicheportiche-Ayache. « Quand on arrête, on brûle moins et on stocke davantage ». Résultat : sans augmenter ses apports caloriques, on a tendance à grossir. « Cela revient en fait le plus souvent à revenir au poids qui devrait être le sien sans tabac ».
Que faire ?
« Il faut rétablir un vrai petit-déjeuner, renforcer le déjeuner, instaurer une collation équilibrée et alléger le dîner (protéines + légumes, voire un peu de féculents en fonction de l’activité physique) », recommande la nutritionniste. En clair, l’apport en féculents doit se faire surtout en première partie de journée, si on n’est pas sujet.te aux fringales en soirée.
L’arrêt du tabac peut aussi faire prendre du ventre
La nicotine, en mimant l’action d’un neurotransmetteur, l’acétylcholine, possède un effet stimulant sur les intestins. À l’arrêt de la cigarette, des problèmes de constipation peuvent ainsi survenir et, s’ils se cumulent à un stockage adipeux abdominal, contribuer à majorer le tour de taille. Il est indispensable d’augmenter sa consommation de fibres en consommant à chaque repas des légumes et/ou des fruits, en troquant les céréales affinées contre leurs homologues complets. « Mieux vaut dans un premier temps panacher cru et cuit », recommande le médecin.
Arrêt du tabac : si vous êtes stressé.e et compensez avec la nourriture
En période de sevrage, il faut trouver des moyens d’atténuer son stress. Et l’on sait que les produits gras et sucrés provoquent la sécrétion de neuromédiateurs apaisants.
Que faire ?
Enrichir son assiette en nutriments qui agissent comme des régulateurs de l’humeur : magnésium (des eaux minérales comme Hépar, Contrex ou Rozanna, légumineuses, oléagineux…), tryptophane (laitages, volaille, banane…) et oméga-3 (poissons gras, huiles de colza et noix, algues…) notamment.
Dans tous les cas, pour aider à réguler son poids :
- On s’hydrate : boire régulièrement trompe la faim et élimine les toxines. Au choix : eau, tisane, thé… Choisissez des boissons non sucrées, pour ne pas vous habituer à consommer trop de glucides, et pour mieux contrôler votre poids ;
- On bouge : le sport (ou la reprise d’un sport si l’on avait arrêté à cause de la cigarette) présente un double intérêt en période de sevrage : il permet de consumer les calories qui étaient auparavant brûlées par la cigarette ; il aide à évacuer le stress et à renouer avec son corps ;
- On prend garde aux chewing-gums, même sans sucre, qui peuvent ouvrir l’appétit par le fait de mâcher, leur goût sucré et acide ;
- On prend de nouvelles habitudes : de nombreuses activités peuvent vous occuper quand l’heure où vous fumiez votre cigarette arrive. Après le repas, baladez-vous, plongez-vous dans un livre, faites des Sudoku…
Prenez du recul par rapport à cette éventuelle prise de poids : priorité à votre santé avec l’arrêt de la cigarette, le bénéfice sera gigantesque par rapport aux quelques kilos pris (ou non) durant cette période.