Définition et symptômes : qu’est ce que l’allodynie ?
L’allodynie désigne une douleur provoquée par une stimulation habituellement non douloureuse, telle qu’un simple contact, une caresse, un effleurement ou une légère variation de température au contact de la peau.
Dr Michael David, algologue : Cette douleur peut se manifester par une sensation de brûlure, de décharge électrique, de fourmillement ou encore de picotement. Elle appartient le plus souvent à la catégorie des douleurs neuropathiques.
On dit d’une douleur qu’elle est neuropathique – ou neurogène – lorsqu’elle est liée à une atteinte du système nerveux central ou périphérique, c’est-à-dire touchant le cerveau, la moelle épinière ou les nerfs.
L’allodynie n’est donc pas une pathologie à part entière, mais elle est un symptôme. « Elle peut être le symptôme d’une maladie, ou être consécutive à un traitement, à une chirurgie ou encore à un accident vasculaire cérébral » énumère le spécialiste.
Thermique, tactile ou mécanique, liée au mouvement : les différents types d’allodynie
Il existe trois types d’allodynie différentes, en fonction des stimuli qui la déclenchent.
– L’allodynie thermique se manifeste lorsque la peau est en contact avec des températures modérément chaudes ou froides. « L’allodynie amplifie les sensations de chaleur ou de froid, qui peuvent provoquer une réelle sensation de brûlure » décrit l’alogologue.
– L’allodynie tactile ou mécanique : la douleur se déclenche au toucher, lorsqu’une simple pression est exercée sur la peau,
– L’allodynie de mouvement ou dynamique: qui peut être provoquée par le frottement d’un tissus ou d’une prothèse ou encore de l’eau qui coule sur la peau,
Causes : Qu’est-ce qui provoque l’allodynie ?
L’allodynie est le résultat d’un dysfonctionnement du système de la douleur consécutive à une affection, lésion ou dysfonctionnement des circuits neuronaux dans la moelle épinière, les nerfs ou les terminaisons nerveuses.
Les causes neuropathiques : la chirurgie, le diabète, l’AVC, la hernie discale …
Ce sont les causes les plus fréquentes d’allodynie. Les douleurs neuropathiques postopératoires sont générées par la lésion traumatique d’un nerf au cours de la chirurgie. Ces douleurs peuvent apparaître jusqu’à trois mois après la chirurgie et sont fréquentes puisqu’elles touchent 10 à 30% des personnes opérées.
Le diabète est également pourvoyeur de douleurs neuropathiques, appelées polyneuropathie diabétique ou polynévrite, et concernant le plus souvent les membres inférieurs. Elles atteignent généralement les deux jambes, en débutant par les pieds et en remontant le long des jambes.
Enfin, l’accident vasculaire cérébral (AVC) provoque des douleurs neuropathiques dans près de 1 à 10 % des cas. Ce sont alors des douleurs chroniques et invalidantes, généralement de forte intensité.
Dans certains cas, la hernie discale peut venir comprimer une ou plusieurs racines nerveuses proches du disque et être à l’origine de douleurs sciatiques. « La racine, même libérée de la compression peut rester abîmée et provoquer une zone suspendue allodynique » explique le spécialiste.
Une cause a part : La fibromyalgie
La fibromylagie est une maladie dont les causes sont encore méconnues.
Dr David : La fibromyalgie est à l’origine de douleurs nociplastiques, à savoir de douleurs chroniques qui résultent d’une altération des mécanismes de perception de la douleur malgré l’absence évidente de lésion qui pourrait causer leur activation. Elles revêtent l’aspect de douleurs neuropathiques, sans qu’il y ait de lésions.
Elles seraient à priori liées à un dysfonctionnement du système neurologique mais cela n’a pas encore été démontré jusqu’à présent.
« Plusieurs études montrent que les personnes souffrant de fibromyalgie ont un seuil de déclenchement à la douleur plus bas que les autres, voire que les douleurs apparaissent spontanément » précise l’algologue. Cette pathologie est à l’origine d’une allodynie très variable dans le temps.
Quid du stress ?
Le stress n’est jamais la cause d’allodynie, en revanche, le ressenti de la douleur – quelle qu’en soit sa cause – a tendance à être augmenté par les émotions négatives (stress, peur, anxiété …).
« Les personnes anxieuses ou très stressées ont une augmentation de la perception de la douleur » confirme le Dr David.
Traitement : Comment soigner et soulager l’allodynie ?
Les douleurs allodyniques peuvent être atténuées mais rarement totalement soignées. « Les trois quarts du temps, l’intensité des douleurs est atténuée afin de les rendre tolérables, mais on ne promet pas leur guérison » indique l’algologue.
Lorsque les allodynies dépendent d’une douleur neuropathique, la guérison n’est pas possible.
« Hernie discale, diabète, AVC : toutes les causes qui abîment et provoquent un dysfonctionnement du système nerveux ne peuvent être guéries. Le but est d’améliorer la qualité de vie du patient » explique le médecin.
Traitement médicamenteux : anti-épileptiques et anti-dépresseurs
Les antiépileptiques sont proposés pour diminuer l’hyperactivité du système nerveux
Les antidépresseurs permettent de renforcer les voies de rétrocontrôle de la douleur.
Traitements locaux par les topiques
La capsaïcine, une molécule de la famille des alcaloïdes naturellement présente dans le piment, a fait ses preuves dans la prise en charge de la douleur neuropathique périphérique de type allodynique.
« On propose des pansements à base de capsaicine afin de désensibiliser la zone allodynique » explique le médecin.
Ces pansements à base de capsaïcine possèdent une AMM (autorisation de mise sur le marché) dans le traitement des douleurs neuropathiques périphériques chez les adultes.
La toxine botulique
Une récente étude (1) a montré que la toxine botulique de type A, commercialisée sous le nom de Botox ou Xeomin entre autres, pourrait être un traitement de recours intéressant pour soulager les douleurs neuropathiques périphériques.
La neurostimulation transcutanée
La neurostimulation électrique transcutanée (TENS), qui utilise un courant électrique afin de soulager la douleur, serait également efficace pour soulager les douleurs allodyniques.
L’acupuncture, la sophrologie, la relaxation, la méditation …
Ces différentes approches alternative de traitement de la douleur sont efficaces sur les facteurs d’aggravation des douleurs (stress, anxiété, angoisses …) et permettent donc d’amener davantage de stabilité dans le ressenti de la douleur.
La rééducation sensitive
Mis en place par Claude Spicher, un médecin suisse, ce traitement consiste à stimuler les zones non douloureuses (saines) autour de la douleur allodynique. « Elle a pour but de réduire progressivement la zone allodynique, mais elle demande une grande implication du patient » indique le Dr David.
D’une manière générale, pour soulager ce types de douleurs, le patient doit être actif et acteur de sa santé. « Quand la douleur est atténuée, un engourdissement prend le relai de la douleur » ajoute le spécialiste.
Quelle différence avec l’hyperalgésie et l’hyperpathie?
Il s’agit de trois formes de douleurs neuropathiques, dont les différences sont subtiles.
« L’allodynie est une douleur déclenchée par un stimulus non douloureux alors que l’hyperalgésie correspond à la perception exagérée de la douleur pour un stimulus douloureux. L’hyperpathie quant à elle traduit la persistance dans le temps d’une sensation douloureuse anormalement ressentie après l’arrêt d’un stimulus douloureux notamment si ce dernier a été répétitif » résume l’algologue.